Retraites : décryptage des annonces du Premier Ministre du 13 février 2020
Communiqué de l'UNSA
Courier du 1er Ministre - Restitution des concertations
Bonjour à tous,
Jeudi 13 novembre, le Premier Ministre a convoqué les partenaires sociaux pour leur présenter la restitution des concertations lancées dans le cadre de la réforme des retraites sur les 4 thématiques suivantes :
- la prise en compte de la pénibilité et l’emploi des seniors,
- le minimum de pension et le calcul des droits acquis,
- la pénibilité et les fins de carrière dans la Fonction Publique,
- l’aménagement des fins de carrière à l’hôpital.
L’UNSA a pris acte des avancées obtenues sur les transitions et le minimum contributif ou encore sur la retraite progressive.
La clause « à l’italienne »
Cette clause sera mise en œuvre pour le calcul des droits, pour tous les salariés du secteur public et privé nés à partir de 1975. Ainsi, les droits acquis dans l’ancien système seront pris en compte au moment du départ à la retraite. La bascule dans le nouveau système universel prévoira en effet une pension découpée en 2 parties pour tous ceux qui seront à cheval entre les 2 systèmes :
- une « première partie de carrière », avec les anciennes règles,
- une « deuxième partie de carrière » basée sur un système à points.
Dans la Fonction Publique, les droits acquis jusqu’en 2025 seront intégralement comptabilisés et convertis en points sur la base des 6 derniers mois de la carrière.
Dans le secteur privé, la retraite sera calculée par référence aux 25 meilleures années sur l’ensemble de la carrière. Parmi les différents scenarii évoqués, cette solution portée par l’UNSA dans ses revendications, est de loin la plus favorable aux salariés.
Le minimum de pension
Il sera porté à 1 000 euros par mois dès 2022 puis à 85% du SMIC en 2025. Les temps partiels en bénéficieront également.
L’augmentation du minimum de pension est une première victoire car elle permet un accroissement du pouvoir d’achat des assurés les plus précaires. Le Premier Ministre a renvoyé à la conférence sur l’équilibre et le financement des retraites, la responsabilité de proposer ou non des avancées sur ce sujet.
Pour l’UNSA, il faut aller encore plus loin et nous porterons dans la conférence la nécessité d’adopter une trajectoire portant, à terme, ce minimum à 100 % du SMIC.
Les droits familiaux
Pour les salariés nés avant 1975, ils seront comptabilisés dans le nouveau et dans l’ancien système. Ainsi, par exemple pour une famille de 3 enfants on appliquera :
-> 10 % de pension supplémentaire pour l’homme et la femme jusqu’au 1er janvier 2025.
ET
-> une majoration de pension de 5% par enfant pour l’un ou l’autre des parents, plus 2% de pension supplémentaire pour le 3ème enfant pour la carrière à partir du 1er janvier 2025.
La retraite progressive
Les annonces du Premier Ministre sont en-deçà de nos revendications. S’il acte son ouverture dès 60 ans à partir de 2022 aux agents de la Fonction Publique ainsi qu’aux salariés du secteur privé, il reste néanmoins silencieux sur nos autres revendications. Pour l’UNSA, l’amélioration de l’accès à la retraite progressive ne doit pas se traduire par une perte de droits. À ce titre, nous demandons toujours que les cotisations vieillesse restent basées sur la rémunération à temps plein et ce, afin de garantir une pension à 100 % lors du départ effectif en retraite.
La Ministre du Travail engagera une réflexion autour d’un Compte Epargne Temps qui suivrait les salariés tout au long de leur vie. Pour l’UNSA, la mise en place d’un tel CET ne peut se concevoir que sous certaines conditions. Ainsi, il faut que ce compte soit universel et transférable et qu’il puisse être alimenté dans les conditions actuellement définies par le Code du travail (5e semaine de congés annuels, congés supplémentaires pour fractionnement ou issus de droits conventionnels, RTT…).
Pour la Fonction Publique, le gouvernement souhaite déplafonner le CET. Pour l’UNSA, une négociation devra s’ouvrir sur ce sujet afin notamment de s’assurer que chaque agent puisse en bénéficier.
L’Hospitalière
Sur la problématique plus particulière des agents hospitaliers, le gouvernement annonce la création d’un fonds de prévention de 40 millions d’euros qui aura pour mission d’améliorer la QVT et la prévention des risques. Pour bénéficier de ce fonds, il sera nécessaire de négocier des accords locaux majoritaires. L’UNSA prend acte de ce dispositif qui devra permettre d’améliorer effectivement les conditions de travail et d’emploi des salariés à l’hôpital.
Les fins de carrière pour les agents hospitaliers et les aides-soignants seront revus, le Premier Ministre propose la mise en place d’un mi-temps payé 75% du salaire à temps plein et avec des droits à retraite calculés sur un temps plein. Si ce dispositif, pour l’UNSA, peut permettre d’améliorer les fins de carrière des agents, il ne compensera pas pour autant le service actif.
Les catégories actives
Quant aux catégories actives mises en extinction, il a été réaffirmé que tout agent ayant atteint la durée de services, au 1er janvier 2025, lui permettant d’obtenir un départ anticipé conservera ses acquis. Pour les autres, une proratisation sera réalisée permettant un départ anticipé a due concurrence. L’UNSA regrette qu’aucune solution n’ait été proposée pour les métiers insalubres.
La pénibilité
Le Premier Ministre a annoncé l’ouverture du Compte Personnel de Prévention (C2P) aux agents de la Fonction Publique dès 2022, une meilleure prise en compte de la poly-exposition, un renforcement des négociations de branche en matière de prévention de la pénibilité et une meilleure prise en compte de la reconversion, permettant aux salariés exposés à des travaux pénibles de bénéficier d’une formation.
Pour l’UNSA, la prise en compte de la pénibilité doit s’appuyer sur un triptyque prévention, reclassement, réparation.
- Sur la prévention, le renforcement de la négociation dans les branches va dans le bon sens, le gouvernement leur laissera 6 mois pour négocier. Cet accord devra repérer les métiers exposés à de la pénibilité (critères du C2P plus les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, l’exposition aux agents chimiques) et proposer des actions concrètes. Pour les salariés du privé, la branche AT/MP prévoira une enveloppe de 100 millions d’euros pour financer ces actions. L’UNSA regrette toutefois que le gouvernement n’ait pas prévu de sanctions pour les entreprises peu ou pas vertueuses.
Une visite médicale sera mise en place systématiquement à 55 ans pour les salariés exposés à des métiers pénibles. L’objectif sera de mieux repérer les salariés qui pourraient faire valoir un départ en retraite anticipé. L’UNSA prend acte de cette proposition ; - Sur le reclassement, l’UNSA considère que le déplafonnement du volet formation du C2P va dans le bon sens car cela permettra d’offrir aux salariés concernés une formation plus longue et plus approfondie. Ainsi, un salarié exposé pendant 20 ans à de la pénibilité pourra bénéficier d’une formation d’une durée de 6 mois et d’un budget de 12 500 euros pour les frais pédagogiques.
En ce qui concerne la poly exposition, le Premier Ministre a proposé l’obtention de 10 points par an contre 8 points actuellement pour une exposition au moins à 2 facteurs, et de 15 points pour une exposition à plus de 3 risques, ce qui était impossible jusqu’à présent. Dans le même esprit, les points C2P seront déplafonnés. Aujourd’hui, un salarié ne pouvait pas obtenir plus de 100 points sur toute sa carrière. Ces propositions répondent à nos revendications. - Sur la réparation, les propositions du Premier Ministre sont loin d’être satisfaisantes. Il est toujours hors de question de réintégrer les 4 critères de pénibilités supprimés en 2017, à savoir :
- la manutention manuelle de charges,
- les postures pénibles,
- les vibrations mécaniques,
- l’exposition aux agents chimiques.
Les situations professionnelles de centaines de milliers de travailleuses et de travailleurs (ouvriers des bâtiments et travaux publics, déménageurs, salariés agricoles…) sont ainsi ignorées. L’instauration d’une décote plus faible pour les salariés en départ anticipé en raison de leurs expositions aux critères de pénibilité du C2P (avant l’âge d’équilibre) ne répond pas à notre revendication. Pour l’UNSA, l’âge d’équilibre et l’âge d’ouverture des droits pour ces salariés doivent coïncider. Ils doivent donc pouvoir partir dès 60 ans sans malus.
Bilan
Comme vous pouvez le constater, même si nous actons des avancées significatives, il reste encore beaucoup à obtenir. Nous devons donc continuer à peser sur les députés et les sénateurs afin d’engranger de nouvelles avancées pour les assurés.
C’est ce que nous ferons dans le cadre de la conférence sur l’équilibre et le financement des retraites dont les premières réunions débuteront la semaine prochaine. Deux groupes de travail traiteront en parallèle l’un de l’équilibre financier à horizon 2027, l’autre du pilotage du système de retraite universel.
Les résultats de cette conférence devraient être connus fin avril.
L’UNSA mettra tout en œuvre afin qu’un compromis social acceptable puisse être trouvé. Pour y parvenir, les représentants des employeurs devront prendre leur part d’efforts. En effet, l’UNSA ne saurait accepter que les arbitrages retenus se soldent par un « bonus » pour les employeurs et un « malus » pour les salariés.
Dominique Corona
Secrétaire général adjoint de l’UNSA